09/12/2024

La forêt est un corps et le corps est une forêt

 

Isabel Pérez del Pulgar

Isabel Pérez del Pulgar est une artiste plasticienne espagnole, qui vit et travaille depuis dix ans en Bretagne, à Douarnenez. Après un long parcours dans la recherche picturale, elle se rend compte qu’avec la peinture, il lui manque quelque chose. En 2000, elle découvre la vidéo, et elle commence alors à explorer ce médium qui ouvre tant de champs d’expression. « La vidéo c’est mon truc ! » Ce sera son moyen de travail privilégié.


"Nous sommes forêt"

Sa dernière vidéo est intitulée: « Nous sommes forêt. » Isabel Pérez del Pulgar fait une analogie entre le corps humain et la forêt. Elle compare en effet les cellules nerveuses de l’homme au mycélium, cet ensemble de filaments souterrains ramifiés qui forment la partie végétative des champignons. « On peut parler d’une similitude de structure et de comportement entre les mycéliums, le cerveau humain et la façon dont Internet est conçu », souligne-t-elle.  Autrement dit: « La forêt est un corps et le corps est une forêt ».


L’installation qu’elle a présenté en novembre et décembre à « Bouillons Kub », à Orval, dans la Manche (1), est une étonnante oeuvre pluridisciplinaire. Le travail de la vidéaste est vraiment fascinant. Il tient à la fois de la performance, de l’assemblage d’objets ramassés dans la nature, de l’installation, de l’enregistrement de sons dans la forêt, de musique électroacoustique et de poignantes scènes de danse. C’est une oeuvre totale, onirique et intimiste, fantastique et singulière, qui dit la fragilité de nos existences mais aussi notre force invisible. Dans cette vidéo, comme toujours, l'artiste se met en scène. « Mon propre corps articule l’espace. » 








Dans la construction de l’exposition, elle a repris, sur une grande table, l’idée des cabinets de curiosités, « avec l’intention de créer un microcosme ».

 








 

 


 

 


 

La vidéo, de huit minutes trente, se répète en boucle sur le mur. « Dans un enchevêtrement de branches,  Isabel Pérez del Pulgar danse, voire elle lutte ou se débat », explique André dans son journal de « Bouillons Kub ». On la voit allongée sur un lit de feuilles mortes et on peut assister « au commencement de sa lente métamorphose de chrysalide à papillon de nuit ». « La phase la plus troublante à mes yeux, poursuit André, est celle où les deux femmes en noir sont associées à deux pierres blanches. Leur forme évoque à la fois le galet et l’oeuf. Elles sont animées par un battement, tel un coeur. »

 

 




La pierre respire. Le paysage respire, il est vivant, il est en train de se réveiller. La forêt respire, elle est vivante. Nous sommes vivants nous aussi. Nous respirons. Nous sommes forêt.



Bruno SOURDIN.


  1. Bouillons Kub, un lieu d’exposition d’art contemporain, à Orval-sur-Sienne, près de Coutances (50). 

https://www.bouillonskub.com