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Ron Whitehead. |
En septembre 2021, lors du Beat Poetry Festival qui se tenait dans le Connecticut, Ron Whitehead a été intronisé US National Beat Poet Laureate. Une distinction qui lui va comme un gant.
Ron Whitehead est depuis des décennies un activiste de la scène culturelle de Louisville, la grande ville du Kentucky, un État du sud-est des États-Unis, dont il est originaire. Il a publié une trentaine de livres. Son oeuvre a été saluée par de nombreux écrivains américains, à commencer par Hunter S. Thompson, l’auteur de Las Vegas parano, inventeur du journalisme Gonzo et originaire lui aussi du Kentucky: « J'ai depuis longtemps admiré Ron Whitehead. Il est fou comme neuf huards, et sa poésie est un mélange éblouissant de sagesse populaire et de mathématiques pures. »
Lawrence Ferlinghetti, l’éditeur de San Francisco, était également très élogieux: « Ron Whitehead est un vrai visionnaire. Ron Whitehead, là-bas dans le Kentucky, sème les dents du dragon d'un nouvel héroïsme. Ron Whitehead est un bodhisattva du Kentucky. »
L’inspiration de Ron Whitehead est particulièrement généreuse et sensible. On est heureux de découvrir tant d’énergie poétique, dans la droite ligne des voix légendaires de la Beat Generation.
Loin de l’horrible foule
Fais un grand bruit
Menace avec violence
Crie ta victoire
Prends une gorgée nauséabonde
et avale ce qui te dégoûte
Mange de la terre
Mange ton chapeau
Mange tes chaussures
Mange du pâté de corneilles
Mange du foie de porc
Mange de la dinde
Mange des dragons
Mange avec excès
Fais de grands bruits
Exalte-toi
Avale ce qui te dégoûte
Mâche tes foutus mots
Divise
et conquiers
Mange la lune
Dis ce que tu voudras
Mon corbeau et moi nous prenons congés
de tout ce brouhaha
Mon corbeau et moi lisons des livres
et écrivons des poèmes à la maison ce soir
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Photo by Jinn Bug |
Je ne veux pas ce qui n'est pas à moi
Dans ce monde qui se fracture rapidement,
Voici mon rappel quotidien:
Je ne veux pas de tes vêtements.
Je ne veux pas de ta nourriture.
Je ne veux pas de ta maison.
Je ne veux pas de ton boulot.
Je ne veux pas de ta compagne,
Je ne veux pas de ta colère,
Je ne veux pas de ta haine.
Je ne te veux pas.
Je ne veux pas être toi.
Je ne veux pas de ton pays.
Je ne veux pas de tes fusils ni de tes bombes.
Je ne veux pas de ta guerre.
Je ne veux pas de ton apocalypse.
Je ne veux pas ce qui n'est pas à moi.
Plus d'une fois
j'ai été reclus.
J'ai vécu dans les bois,
loin du monde,
à l’étude des Esséniens.
J'ai passé une grande partie de ma vie
comme militant de l’Underground.
Je déteste la politique.
La politique de la cupidité.
La politique du pouvoir.
La politique du viol du pillage
et du meurtre de notre Terre Mère
des animaux et des gens
afin d'acquérir et de conserver égoïstement le pouvoir.
Mais détester la cupidité,
le pouvoir,
n'est que la moitié de mon histoire.
Ne pas vouloir ce qui ne m’appartient pas
est l'autre moitié de mon histoire.
Heureusement, tout le monde
ne veut pas être être un tyran fou
ivre de cupidité et hystérique du pouvoir.
Le seul pouvoir que j’accepte
est celui de ma responsabilité individuelle
et de l’aide à mes voisins.
Ai-je toujours été responsable ?
Bien sûr que non.
Ai-je toujours aidé mes voisins ?
Bien sûr que non.
J'ai échoué plus que n’importe qui.
J'ai dit « Va te faire foutre! » plus d'une fois.
Mais on change. Je l'ai fait. Je le fais encore.
Changer est la règle d’or.
Bien que souvent dans la douleur,
j'accepte le changement.
Tout au long de ma vie,
j'ai changé.
Il est arrivé un moment où
j'ai choisi de prendre des décisions
de manière désintéressée.
J'ai fini par comprendre
qu'être individuellement responsable
et aider ses voisins
crée l’atmosphère individuelle et planétaire la plus saine.
Je choisis de marcher dans ce chemin
aussi loin que ça ira.
Je veux voir où ça va aller.
J'aime ne pas blesser les autres.
J'aime être un bon voisin.
J'aime avoir des amis.
J'aime les gens les animaux
et l'intense beauté
que nous offre la Terre Mère.
Je ne veux pas ce qui n'est pas à moi.
Je suis presqu’un ermite.
Je suis heureux dans la solitude
intérieure et extérieure.
Je choisis de vivre simplement
et de partager la générosité de la Terre Mère avec les autres.
Je serai toujours un militant de l’Underground.
En septembre
En septembre
les étoiles deviennent plus brillantes
les jours raccourcissent
les nuits sont plus longues
Quand tu as tendu le bras
que tu as pris ma main
regardé profondément dans mes yeux
et m’a dit « je t’aime »
j'ai oublié
que nous étions assis dans un restaurant
Je me suis soudain retrouvé
tout près de toi
main dans la main
sous les étoiles
nous embrassant silencieusement
au son d’une musique douce et des clapotis du ruisseau
Le temps s'était arrêté
Rien d'autre n'avait d'importance
Quand le serveur
a demandé « est-ce que ce sera tout »
j'ai dit « oui merci »
Nous restions assis
émerveillés
que ce moment dure
encore un peu plus longtemps
et puis il fut temps de partir
(Poèmes traduits par Bruno Sourdin)