Avec Daniel Giraud à Paris, au Marché de la poésie. |
Dans la
lignée de Gary Snyder, Daniel Giraud est un écrivain Beat pur jus. Amoureux de l’existence et vrai chercheur
d’absolu, poète dionysiaque et libertaire, il a l’âme buissonnière. Cela fait
des années qu’il a tourné le dos au confort et aux plans de carrière, qu’il a
fuit « ce monde de fou ».
Eternel piéton, il écrit comme cela vient : « sur le bord des routes, au comptoir des bars ou dans mon lit. »
Grand
voyageur, il n’est jamais aussi heureux que lorsqu’il flâne sous le ciel de l’Inde,
de la Chine ou de l’Afrique. « Rien
n’est à prouver, dit-il, tout est à
éprouver. » Dans les montagnes suisses de l’Engadine, il a aimé
vagabonder sur les traces de Friedrich Nietzsche et jouir de la liberté
absolue; face au lac Silvaplana, il s’est senti renaître à sa propre destinée :
« J’étais assis là dans l’attente,
dans l’attente de rien. »
Et
quand il n’est pas sur la route, il aime « saisir
le sens de l’éternel présent » dans son ermitage perché dans les
montagnes enneigées de l’Ariège. Ce buveur impénitent, et qui n’en fait pas
mystère, brûle son existence d’une montagne à l’autre, jusqu’à la lie, pour « goûter au ciel » et « saisir la vie en un instant ».
Daniel
Giraud cultive le paradoxe avec jubilation. Il échappe à l’étiquette et aux
définitions. Il ressent la mort dans la vie et la vie dans la mort. Il ose la
liberté et ses phrases cinglent comme des coups de fouet. « Quand une étoile explose, raconte-t-il, elle peut être vue en plein jour. Pour voir les étoiles en plein jour, ne faut-il pas fermer les yeux ? »
Daniel
Giraud est aussi un astrologue traditionnel averti et un grand amateur de
blues, cette musique de rébellion qu’il joue à en faire péter les
cordes de sa guitare. Mais c’est surtout dans le domaine de la pensée et
de la sagesse d’Extrême-Orient que cet « homme
qui marche » ouvre de fascinantes perspectives. On lui doit d’abord,
avec Les Yeux du dragon, une anthologie des grands poètes chinois
classiques, tous imprégnés de
l’esprit du Tao : de l’ermite Han Shan au poète maudit Li Ho ou encore de
Wang Wei à Li Po, l’immortel banni sur terre, auquel il a consacré un livre
devenu culte, Ivre de Tao, Li Po,
voyageur, poète et philosophe.
Daniel
Giraud a également traduit le Sin Ming,
un des rares textes de cet enseignement muet et paradoxal qu’est le chan (qui
deviendra le zen au Japon), qui aurait été écrit au VIIe siècle par
le moine taoïste Fa Jung, qui fonda une école qui enseignait que tout n’est que
rêve. C’est un poème métaphysique de haute volée, « toujours actuel car au-delà des mots », comme le
souligne le traducteur. Ce poème commence par ces deux vers révélateurs : « La nature de l’esprit est non-née/
Qu’attendre de voir et savoir ? »
Ce que
l’écrivain ariégeois cherche dans la fréquentation des anciens du Tao, c’est à
établir un lien avec les poètes libertaires d’Occident et insister sur ce
qu’ils ont de commun : savoir être libre comme l’air, être simple et
détaché, chevaucher le vide et sortir de l’ordinaire « par la porte étroite »… Les taoïstes chinois disaient
qu’il fallait « arracher les racines
des montagnes ». « Sans
valise ni repère, ajoute Daniel Giraud, prendre
la clé des champs qui ouvre sur l’inconnu, sur la vie comme sur la mort, sur
l’insécurité absolue. »
B. Sourdin.
Essais
Ivre de Tao, Li Po, voyageur,
poète et philosophe,
Spiritualités vivantes, Albin Michel, 1989.
Le rien du tout, Révolution intérieure, 1999.
Traduction
Les Yeux du dragon, une
anthologie de poésie chinoise, Le Bois d’Orion, collection Points Poésie, 2009.
Yi king, texte et interprétation,
Bartillat, 2003.
Sin Ming (Gravé à l’esprit), La Main Courante, 2004.
Lao Tseu : Tao Te King, le
Livre de la voie et de la conduite, L’Harmattan, 2011.
Récits
Randonnée chinoise, Noël Blandin, 1993.
Quelque part, récit, Bartillat, 2002.
Récits de sagesse
d’Extrême-Orient : récits du tao, du tch’an et du zen, L’Originel, 2007.
La palpite, Séguier, 2009.
Poésie
Par voie et par chemins, Révolution intérieure, 2006.
Intérieur/extérieur, Séguier, 2010.
All to no-thing (préface de Claude Pélieu),
Fage, 2014.
La tournante des images et des
ombres, les
éditions du Contentieux, 2015.
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